Jongler avec la détente et la thérapeutique
Dans le monde de la massothérapie, autant que dans la conception générale des gens et du monde médical, on oppose souvent la détente et le travail thérapeutique.
Je n'ai jamais compris pourquoi et, encore à ce jour, ne crois pas à cette dichotomie : ma pratique témoigne du contraire.
J'ai souvent entendu que les massages de détente ne servent qu'à relaxer, à diminuer le stress, à s'abandonner, à faire rêver (et à baver un peu aussi, pourquoi pas ?), etc. C'est vrai, mais pas que.
J'ai entendu que les massages de détente ne sont que du "flattage", du léger, du superficiel... C'est une croyance ancrée. Et fausse, surtout !
À mon sens, les massages de détente peuvent avoir une très grande profondeur à différents niveaux : profondeur dans le toucher, profondeur dans les effets, profondeur dans la relation thérapeutique.
Oui, les massages de détentes peuvent être doux. Et ce peut être très agréable. Mais la pression peut également être appuyée, forte. Avec trop de pression, bien sûr, les muscles tendent à se spasmes, par protection, et le receveur ne peut trouver l'espace pour se laisser aller. Le secret est de trouver la pression juste pour la personne que l'on touche.
Trouver le niveau de pression où la personne massée peut s'abandonner, c'est permettre au corps de se relâcher plus vite, plus durablement. C'est dénouer des tensions récentes ou anciennes, physiques ou émotionnelles, non pas avec la force physique brute, mais avec la force de la justesse, de l'écoute et du dialogue avec le corps du receveur. Pour chaque receveur, la pression sera différente et pourra aller jusqu'à une très grande profondeur, si c'est ce que le corps nous indique.
La profondeur des effets du massage de détente est probablement celle qui est la plus importante et la plus insoupçonnée. La relaxation permet de rééquilibrer le système nerveux autonome - sympathique et parasympathique. Nous fonctionnons souvent sur le mode sympathique, celui du fight or flight, celui du stress, qui met les muscles sous tension, augmente pression sanguine et fait battre le coeur plus rapidement, etc. C'est le mode du "au-secours-un-ours!" ou du "oh-mon-dieu-je-suis-en-retard-j'ai-ça-et-ça-et-ça-et-ça-à-faire-et-zut-j'ai-oublié-de-dire-ça-à-untel-et-il faut-aller-à-la-pharmacie-et-prendre-rendez-vous-chez-le-garagiste-et...". Le mode du petit hamster qui roule trop vite dans notre tête. Bref, le massage de détente permet, à court et à moyen terme, de diminuer l'intensité de l'activité sympathique et ramener plus d'activité parasympathique. Cela signifie : meilleure digestion, meilleure régénérescence des tissus de l'organisme, meilleure récupération des blessures, meilleur sommeil, etc.
Vous remarquerez qu'il est beaucoup plus facile de se tendre, que de se détendre. Pourtant, ces deux facultés vont de paire et sont essentielles au bon fonctionnement physiologique autant que psychologique. C'est pourquoi un massage de détente peut être d'une grande aide !
La profondeur de la relation thérapeutique, elle, s'accroît grâce au massage de détente, car un système nerveux moins réactif augmente la capacité d'abandon du receveur et, avec elle, la confiance nécessaire à tout travail thérapeutique d'ordre physique ou psychocorporel. Notre corps n'est pas une machine que l'on peut envoyer chez le mécanicien pour qu'il nous la répare sans que nous soyons impliqué dans le processus... Un massothérapeute qui travaille dans l'écoute, le respect et le ressenti de ce que le receveur a besoin dans sa globalité - ce qui, pour moi, est la base d'un massage de détente - créera un espace d'ouverture et de disponibilité où la personne massée pourra se déposer et vivre ce qu'elle aura à vivre, réparer ce qu'elle aura a réparer.
Finalement, je pourrais aussi expliquer comment un travail purement thérapeutique et spécifique, dans le sens plus médical du terme, peut devenir un travail de détente, mais ce sera pour un prochain article.